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Fin des quotas laitiers La filière laitière allemande parie sur l'export

Les professionnels du lait en Allemagne, plus gros producteur européen, font leurs adieux sans états d'âme aux quotas et misent tout sur l'export, même si certains ne cachent pas leurs incertitudes.

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« Nous sommes contents que (les quotas) soient supprimés, et nous avons mis à profit les dernières années pour nous préparer », affirmait récemment Karl-Heinz Engel, président de la fédération des industries du lait Miv. « Le secteur allemand du lait est orienté à l'export, compétitif », faisait-il encore valoir.

Un discours optimiste qui tranche avec les inquiétudes vives de la France, deuxième producteur européen, qui anticipe sur une offre et des prix en baisse. En Allemagne, les intéressés veulent saisir comme « chance » l'expiration du système qui a plafonné la production pendant plus de 30 ans, et n'ont pas de mots assez durs pour les quotas : « mise sous tutelle », « subvention à l'emploi », « échec » dans sa tentative d'enrayer la mort des petites exploitations. Leur nombre a chuté de près de moitié ces 15 dernières années, à quelque 80.000.

Sur les 30 ans d'existence des quotas, l'Allemagne a dépassé son quota alloué 21 années, préférant payer deux milliards d'euros de pénalités au total. Avec 32 millions de tonnes en 2014, le pays est le plus gros producteur de l'UE. Quand le plafond va sauter, le pays devrait être de ceux qui vont augmenter la production, au même titre que l'Irlande, les Pays-Bas ou encore le Danemark. Le Miv table sur une production en hausse de 1 % à 3 % par an jusqu'à 2020. Dans le haut de cette fourchette cela équivaudrait à un plus de presque 20 % sur la période, comme aux Pays-Bas.

Gros investissements

Qui dit quantités en hausse dit en général recul des prix, alors que les producteurs ne touchent pour l'heure que 28 cents par litre, un niveau déjà très bas. Mais la branche s'estime suffisamment préparée pour que les volumes supplémentaires trouvent preneur à prix raisonnable. Les laiteries ont fortement investi dans de nouvelles capacités « surtout dans la fabrication de poudre, de fromage », explique ainsi Monika Wohlfahrt, directrice de la centrale d'information sur le lait Zmb.

Deutsches Milchkontor (Dmk), l'une des plus grosses laiteries allemandes avec 6,7 millions de tonnes achetées l'an dernier, a investi ces cinq dernières années 500 millions d'euros dans des nouvelles lignes de production de fromage, de lait pasteurisé, raconte Reinhard Vogel-Lackenberg, chargé des relations avec les agriculteurs. Pour en faire quoi ? « Le marché en Europe est limité », reconnaît M. Vogel-Lackenberg. Direction l'Asie donc, le Moyen-Orient, tous les pays où « une classe moyenne de plus en plus fournie est prête à payer pour des produits laitiers de qualité ». Dmk a déjà un bureau commercial en Chine et un à Dubaï.

Concurrents sévères

La faiblesse de l'euro par rapport au dollar devrait servir les desseins allemands d'exporter plus, avance Mme Wohlfahrt. Mais dans l'immédiat la crise en Russie, où les importations de fromage en provenance de l'UE sont interdites depuis l'an dernier, complique la donne. La Russie était un gros débouché pour le fromage made in Germany.

Par ailleurs les Allemands ne sont pas les seuls à avoir des vues sur les marchés mondiaux. « Il y a des concurrents très sévères », admet M. Vogel-Lackenberg, citant l'Irlande. Toutes les laiteries qui n'ont pas les reins aussi solides que Dmk, et notamment les petites structures qui desservent des marchés de niche, « vont devoir se battre », prédit René Kramer, chargé du lait au sein de la fédération des organisations coopératives Drv.

Côté producteur en tout cas, personne ne veut laisser passer sa chance de produire plus. « Je me dis qu'en Allemagne, nous n'avons plus beaucoup de place, cela devrait limiter la hausse des volumes, et garantir des prix acceptables », explique Hans-Hartwig Ketels, exploitant dans le nord du pays. Il a investi dans de nouvelles installations, et veut acheter des bêtes à l'été, avec pour objectif de passer de 230 à 300 vaches au 1er octobre. « Mais c'est bien possible que les une ou deux prochaines années soient compliquées », reconnaît-il.

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